Auteur : Sandrine Brotons - Rédactrice en chef de Cortex Média
L'IMPORTANCE DU TRAVAIL POUR LES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP 3/4
Actuellement, une personne en situation de handicap (physique, mental ou maladie chronique) a trois fois plus de difficultés à trouver du travail.
La discrimination et les préjugés, seuls responsables des problèmes d'emploi ?
7% des demandeurs d'emploi avec une reconnaissance de handicap ont un niveau de formation au moins égal au baccalauréat. Près de la moitié ont un niveau BEP/CAP, et un peu plus d'un quart ont un niveau inférieur au BEP/CAP.
Les études montrent que cette population ayant un emploi est nettement plus âgée que la moyenne. Les individus avec un emploi, reconnus en situation de handicap sont plus souvent des ouvriers (30 % d’entre eux, contre 21% pour l’ensemble.). Cela s’explique à la fois par un niveau de qualification moins élevé que la moyenne et par le fait que certains sont reconnus handicapés à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, risques auxquels sont davantage exposés les ouvriers. 2018 - Insee Référence
Par rapport à l’ensemble de la population de moins de 65 ans, les 2,3 millions de personnes en situation de handicap ayant entre 16 et 64 ans sont plus âgées et plus souvent des femmes. Elles sont également moins diplômées et plus éloignées du marché de l’emploi. (Les dossiers de la DREES n° 75 > février 2021.
Danièle Langlois Présidente de l’Association France Autisme, explique lors d’une interview sur la radio Vivre FM, qu’il existe encore beaucoup trop de tabous concernant le trouble autistique. Nous sommes encore trop peu informés sur l’autisme, petit dernier arrivé dans la grande famille des handicaps sur le marché du travail. Ces personnes rencontrent des difficultés à comprendre les relations sociales, des difficultés à gérer l’hypersensibilité sensorielle.
L’accompagnement de ces personnes vers l’emploi est- il bien adapté à leurs besoins ?
« L’accueil des jeunes en situation de handicap dans l’enseignement supérieur progresse d’années en années. Ils étaient 8 500 en 2005 et sont aujourd’hui plus de 20 000 (...). Reste que d’un point de vue global, seulement 7 % de ces jeunes inscrits dans un cursus académique vont dans le supérieur contre 17 % de l’ensemble des jeunes et seulement 1 % de ces étudiants atteignent le niveau bac+5 » déclare Christian Grapin, directeur de l’association Tremplin études-handicap-entreprises lors d’une interview par News Tank, le 16/11/2016.
« Pendant leurs études, les étudiants en situation de handicap rencontrent énormément de difficultés pour trouver un stage ou une alternance ». On peut comprendre que ça ne va pas les encourager à persévérer », rajoute Christian Grapin. « Il faut leur montrer qu’ils ont le droit et l’ambition de poursuivre des études supérieures en luttant contre toutes les inégalités territoriales, sociales et scolaires. »
« Il ne suffit pas de dire aux jeunes en situation de handicap qu’ils peuvent ouvrir des portes, il faut aussi leur montrer qu’elles existent » : Christian Grapin
La difficulté de préserver son emploi lorsque le handicap survient, une disparité selon les situations.
Retrouvons Laurent qui a été licencié après avoir avoué ses problèmes de santé à son responsable. Comment a-t-il repris le cours de sa vie entre sa maladie chronique et le licenciement abusif qu’il a subi ?
« Dans un premier temps, j’ai voulu retrouver un travail dans le milieu de l’industrie mais comme ma maladie me faisait perdre peu à peu ma mobilité, j’ai préféré ne pas renouveler mon CDD. J’ai fait le nécessaire pour avoir la Reconnaissance de Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH). J’ai pensé que travailler dans la fonction publique serait plus adapté pour moi. En 2012, j’ai trouvé un poste d’ingénieur en mécanique au CNRS (Centre National de Recherches Scientifiques). Ce poste correspond tout à fait à ce que je sais faire, à ce que j’aime faire. Aujourd’hui, je travaille toujours à temps plein, 3 jours au labo et 2 jours en télétravail. Ma maladie est bien là mais j’ai trouvé des solutions pour combler ma perte de mobilité. Je pratique même du sport en allant travailler car j’y vais en vélo. Il est adapté à mon handicap et c’est chouette ! »
Une belle revanche pour Laurent…
Nous rencontrons Isabelle Bras. Cette femme de 45 ans, nous donne rendez-vous dans un lieu accessible pour son fauteuil roulant. Isabelle est atteinte d’une maladie chronique invalidante diagnostiquée en 2003. Son histoire illustre la violence à laquelle sont parfois confrontées les personnes lorsque survient le handicap et que le monde de l’entreprise se ferme. A l’époque, Isabelle travaille à temps plein en tant qu’assistante qualité dans une entreprise de semences végétales. En 2014, sa maladie se déclare avec des difficultés à la marche, des chutes à répétitions, des fatigues soudaines et invalidantes. Son médecin lui propose un traitement qui s’avère lourd et difficile à gérer.
Mise en arrêt maladie, elle est ensuite contrainte de prendre un mi-temps thérapeutique. « Après 6 mois de mi-temps », raconte Isabelle, « je suis convoquée par la sécurité sociale. Là-bas, une personne m’annonce que je ne peux pas reprendre mon travail à temps plein, vu mon état de santé. Je ne m’attendais pas du tout à une telle annonce. Je n’ai aucune autre explication à part que je vais être convoquée par le médecin conseil de la sécurité sociale. » Une annonce choc pour Isabelle, qui se retrouve seule face à ses questions et un avenir incertain. « Complétement perdue, je vais donc voir mon neurologue. Sa seule réponse est : « votre mari doit bien gagner sa vie… » Au lieu de me rassurer, il me rajoute du stress et de la colère. En fait, j’ai une meilleure situation professionnelle que mon mari et sous- entendre qu’une femme mariée peut se permettre de ne pas travailler, j’ai du mal avec ce genre de cliché ! Dans ma tête, je me demande comment nous allons faire pour le remboursement du prêt immobilier, si je ne peux pas reprendre le travail à temps plein. »
Quelques mois passent, les questions s’accumulent. Isabelle est convoquée par le médecin conseil de la Sécurité Sociale qui l’informe de sa mise en invalidité catégorie 1. Une annonce qui se fait sans plus de précision, comme en témoigne Isabelle : « Qu’est-ce que ça veut dire invalidité catégorie 1, je n’en ai aucune idée. Je cherche moi-même les réponses à toutes mes questions. Car même l’assistante sociale qui m’accompagne me renseigne mal sur mes droits par rapport à mon invalidité. Heureusement, je trouve un juriste qui éclaircit un peu tout ça. »
Cette invalidité catégorie 1 va permettre à Isabelle de continuer de travailler à temps partiel et de toucher une pension équivalente à 30% de son ancien salaire pour compenser sa perte de revenu.
Aujourd’hui Isabelle travaille à 70%, « j’ai des horaires cools et mon bureau a été aménagé. Si je me sens trop fatiguée pour me déplacer, je télétravaille car mon employeur est très conciliant avec moi. »
Le parcours d’Isabelle n’est pas un cas isolé. Pour éviter ce genre de désagrément, la plupart des personnes en situation de handicap, lorsque celui-ci est invisible, préfèrent taire leurs problèmes de santé.
« Tant que mon handicap ne se voyait pas, je n’ai pas dit à mes collègues que j’avais une maladie chronique invalidante. Je craignais trop les jugements, les changements de regards » avoue Valérie Bayon, salariée dans une banque, « j’avais très peur que l’on me mette au placard ».
Dans l'article 4 découvrez pourquoi les personnes en situation de handicap souhaite travailler.
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Nos sources
AGEFIPH : Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées. www.agefiph.fr
FIPHFP : Fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. www.fiphfp.fr
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